IMLebanon

Donald Trump devient le 45e président des États-Unis

Donald Trump est devenu hier le 45e président des États-Unis, promettant dans un discours très offensif aux accents résolument populistes d’articuler sa politique autour d’un seul axe : « L’Amérique d’abord. »
Main gauche sur la Bible, main droite levée, le magnat de l’immobilier, porté au pouvoir sur une rhétorique anti-élites à l’issue d’une campagne acerbe, a prêté serment comme l’ont fait avant lui George Washington, Franklin D. Roosevelt ou John F. Kennedy. « Je jure solennellement de remplir fidèlement les fonctions de président des États-Unis et, dans toute la mesure de mes moyens, de sauvegarder, de protéger et de défendre la Constitution des États-Unis », a-t-il déclaré, sur les marches du Capitole, cravate rouge et visage grave. Dans un discours évoquant ceux de sa campagne, en rupture avec la tonalité généralement observée dans ce contexte, le 45e président des États-Unis a promis de « transférer » le pouvoir vers le peuple et appelé à « une nouvelle fierté nationale ». « Ensemble, nous rendrons sa force à l’Amérique. Nous rendrons sa richesse à l’Amérique. Nous rendrons sa fierté à l’Amérique. Nous rendrons sa sécurité à l’Amérique. Et, oui, nous rendrons sa grandeur à l’Amérique », a-t-il conclu, brandissant le poing, une image surprenante lors de ce type de cérémonie.

 

(Lire ici le verbatim du discours de Trump)
À 70 ans, sans la moindre expérience politique, diplomatique ou militaire, l’homme d’affaires de New York succède à la tête de la première puissance mondiale au démocrate Barack Obama, 55 ans, sous le regard inquiet des alliés des États-Unis, échaudés par ses déclarations tonitruantes, parfois contradictoires. La cérémonie, suivie en direct par des millions de personnes à travers le monde, avait un goût de revanche pour celui dont l’annonce de candidature, en juin 2015, avait été accueillie par des ricanements, chez les républicains comme chez les démocrates.
Dès avant l’aube, sous un ciel menaçant, des milliers d’Américains s’étaient rassemblés sur le National Mall. Mais les vues aériennes des immenses pelouses montraient une mobilisation populaire limitée, dans un contraste saisissant avec l’investiture de Barack Obama, au même endroit, il y a huit ans.

 

(Investiture de Trump : retour en images sur une journée historique)

 

« Tout commence aujourd’hui »
Pour cette journée historique, Donald Trump et sa femme Melania ont suivi la même tradition protocolaire que leurs prédécesseurs. Après s’être rendus à l’église St John, ils ont été accueillis pour un thé à la Maison-Blanche par Barack et Michelle Obama, en compagnie également du futur vice-président Mike Pence et son épouse, puis ont rejoint le Capitole. En soirée, le couple présidentiel s’est installé à la Maison-Blanche.
Après le temps de la campagne (17 mois) et celui de la transition (deux mois et demi), voici venu celui de l’exercice du pouvoir (quatre ans) pour cet ancien animateur d’une émission de télé-réalité qui a promis de « rendre sa grandeur à l’Amérique ». Le magnat de l’immobilier a obtenu 63 millions de voix contre les 65,8 millions d’Hillary Clinton, pourtant perdante dans le système de suffrage indirect.
Des manifestations hostiles se sont déroulées jeudi soir à New York, et hier à Manille, Berlin ou encore Bruxelles et Miami. À Washington, dans le centre-ville, des manifestants antiracistes, féministes ou autres faisaient face à la police et aux supporteurs du milliardaire, aux cris de « Non à Trump, non au KKK, non aux États-Unis fascistes ! » (voir ici). Plusieurs centaines de manifestants masqués et habillés de noir ont provoqué des incidents lançant des pierres et cassant des vitrines. La police a fait usage de gaz lacrymogènes pour les disperser.

 

Impopularité record
L’équipe de Donald Trump a annoncé pour le début de la semaine prochaine une série de décrets visant à défaire une partie du bilan de son prédécesseur démocrate (climat, immigration…) et ébaucher le sien. Dès hier soir, la Maison-Blanche a annoncé que les États-Unis vont abandonner leur politique de réduction des énergies polluantes et reprendre le forage du pétrole et du gaz de schiste pour créer des emplois et payer la rénovation des infrastructures publiques (lire ici).
La tâche s’annonce néanmoins ardue pour l’auteur du best-seller The Art of the Deal, qui a promis, avec un sens de la formule qui enchante ses partisans et consterne ses détracteurs, d’être « le plus grand créateur d’emplois que Dieu ait jamais créé ». La constitution de ses équipes a été difficile tant la victoire a pris le camp républicain par surprise, et les premières semaines pourraient être chaotiques. En outre, jamais depuis 40 ans un président américain n’avait pris le pouvoir avec un niveau d’impopularité aussi élevé. Et ceux qui espéraient que la fonction change l’homme ont été déçus. Sur Twitter, le septuagénaire continue de régler quotidiennement ses comptes avec ceux qui le critiquent. « Il semble vouloir se battre contre tous les moulins à vent de la Terre plutôt que de se concentrer sur le fait d’endosser le poste le plus important au monde », a résumé d’une formule assassine le sénateur républicain John McCain. Résultat, l’opposition démocrate fourbit ses armes, et des dizaines d’élus ont boycotté la cérémonie.

 

(Reportage : Ferveur historique à Washington pour l’Amérique pro-Trump)

 

Obama « citoyen »
Sur la scène internationale, le bouillant promoteur immobilier a déjà décoché ses flèches à l’encontre de la Chine, de l’Otan ou encore de la chancelière allemande Angela Merkel. Or, c’est sur ce front que son mandat suscite les plus grandes interrogations. Les dirigeants de la planète s’interrogent sur la valeur exacte à accorder à ses déclarations quand les responsables qu’il a nommés à la diplomatie ou au Pentagone prennent des positions apparemment inverses, comme sur la Russie de Vladimir Poutine ou l’accord nucléaire iranien.
Juste après la cérémonie, Barack Obama, 55 ans, s’est envolé directement vers la Californie pour ses premières vacances d’ancien président. Après huit années au pouvoir, le démocrate, qui a surmonté durant sa présidence une crise économique et financière menaçant de tout emporter sur son passage, a indiqué qu’il entendait rester à l’écart de la « mêlée » pour laisser son successeur gouverner, mais à condition que certaines lignes rouges ne soient pas franchies. « Je ne m’arrêterai pas ; je resterai là avec vous, en tant que citoyen », a écrit Barack Obama sur Twitter, l’un de ses derniers tweets sous le compte @POTUS, qui a ensuite été transféré à son successeur.

 

ILS ONT DIT…

Donald Trump a pris hier ses fonctions de président des États-Unis. Voici quelques-unes des réactions internationales suscitées par son investiture :

  • Theresa May, Première ministre britannique : « Je suis certaine que Donald Trump reconnaîtra l’importance de l’Otan. Je suis également confiante sur le fait que les États-Unis reconnaîtront l’importance de lacoopération que nous avons en Europe pour assurer notre défense et notre sécurité collectives. »
  • François Hollande, président français : « Fermer les frontières comme le recommandent certains, dont celui qui prête serment à Washington, qui voudrait des taxes ou des droits pour empêcher un certain nombre de produits de venir aux États-Unis reviendrait à remettre en cause (le) travail. »
  • Sigmar Gabriel, vice-chancelier allemand : « Ce que nous avons entendu aujourd’hui avait une tonalité très nationaliste. Je pense que nous devons nous préparer à une rude chevauchée », a-t-il dit au micro de la ZDF. L’Europe et l’Allemagne doivent, selon lui, rester unies « pour défendre (leurs) intérêts ».
  • Justin Trudeau, Premier ministre canadien : « Le Canada et les États-Unis ont bâti l’une des relations les plus étroites au monde. Ce partenariat durable est essentiel à notre prospérité et notre sécurité communes. » Grâce à « une coopération sans égale » pour leur sécurité, le Canada et les États-Unis vont continuer à œuvrer afin « d’assurer la sûreté de notre frontière commune » de près de 9 000 km.
  • Le président mexicain, Enrique Pena Nieto, a félicité Donald Trump et a plaidé pour le renforcement des liens bilatéraux ainsi que pour une « responsabilité partagée », tout en promettant que la souveraineté, les intérêts nationaux et la protection des Mexicains seraient les priorités de cette relation, alors que l’équipe Trump a réaffirmé hier le projet de construction d’un « mur » à la frontière entre les deux pays.
  • Tsai Ing-Wen, présidente taïwanaise : « Félicitations @realDonaldTrump. La démocratie est ce qui unit Taïwan et les États-Unis. Impatiente de renforcer notre amitié et notre partenariat », écrit-elle sur Twitter.
  • Le pape François : « Sous votre direction, puisse la stature de l’Amérique continuer à être mesurée avant tout par son souci pour les pauvres, les exclus et les nécessiteux, qui, comme Lazare, se tiennent devant notre porte. »