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Bassil : « Nous sommes prêts à sacrifier le mandat. »

 

LA SITUATION

Fady NOUN | OLJ06/03/2017

Une semaine politiquement et socialement mouvementée s’ouvre aujourd’hui, avec la bombe lancée durant le week-end par le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, au cours d’un meeting à Batroun. « Pas de budget avant la loi électorale », a-t-il lancé, allant jusqu’à jurer que la loi électorale est, pour le Courant patriotique libre, « encore plus importante que la présidence même ».

Le renversement des priorités ainsi décidé va certainement remettre en question toute l’actualité politique. Normalement, la semaine devait s’ouvrir sur une nouvelle réunion gouvernementale consacrée à l’examen du projet de budget 2017. Mais alors que certains espéraient voir cet examen s’achever rapidement, il semble que ce processus va se ralentir et se compliquer.

C’est ainsi que, pour commencer, outre la réserve exprimée par M. Bassil, une seconde précondition, qui n’est pas nouvelle, a été posée à l’approbation du budget par le vice-président du Conseil des ministres, Ghassan Hasbani (Forces libanaises). Ce dernier a réaffirmé ce week-end que « l’exercice budgétaire 2017 ne sera pas approuvé lundi (aujourd’hui) (…) sans l’adoption, en concomitance, d’un programme de privatisation de la production d’électricité ». Et M. Hasbani d’ajouter que les Forces libanaises ont encore beaucoup de remarques à faire sur des détails du projet de budget.

Avec les nouvelles priorités fixées par M. Bassil et les Forces libanaises, il est probable que les syndicats vont hausser le ton, sachant qu’à l’appel du comité de coordination intersyndical, un grand rassemblement est prévu aujourd’hui même, place Riad el-Solh, en prévision de la réunion consacrée à l’examen du projet de budget et en appui à l’échelle des salaires dans le secteur public. En effet, parallèlement à l’examen du projet de budget par le gouvernement, l’échelle des salaires va être réexaminée aujourd’hui par les commissions parlementaires conjointes. Celles-ci doivent en évaluer à nouveau le coût exact et dire s’il faut qu’elle soit inscrite ou pas dans l’exercice budgétaire 2017, et à quelles conditions.

Notons qu’à supposer que l’examen du projet de budget s’achève cette semaine, il faudra ensuite faire approuver cet exercice lors d’un Conseil des ministres présidé par le chef de l’État.

Signalons enfin qu’indépendamment du budget 2017, le Conseil des ministres se réunira en séance ordinaire, mercredi, à Baabda, pour approuver le train de nominations sécuritaires prévoyant notamment la nomination du successeur du général Jean Kahwagi, en l’occurrence le général Joseph Aoun (sans rapport de parenté avec le chef de l’État). Par ailleurs, ce sera probablement le général Imad Osman, aujourd’hui chef du bureau des renseignements des FSI, qui succédera au général Ibrahim Basbous, tandis que le général Antoine Saliba succédera au général Georges Karaa à la tête de la Sécurité de l’État.

 

Loi électorale

Si M. Bassil met tellement de pressions pour inciter la classe politique à s’entendre sur une nouvelle loi électorale, c’est que les délais pour son adoption commencent à devenir très courts. Il ne reste plus qu’une quinzaine de jours en effet avant le 21 mars, date limite véritable pour la convocation du collège électoral (90 jours avant la date d’expiration du mandat de la Chambre, le 21 juin prochain).

« Entre la loi électorale de 1960 et le vide, je choisirais le vide », avait dit le chef de l’État. Pour sa part, Nabih Berry a récemment affirmé : « Entre le vide et la loi électorale de 1960, je choisirais la loi électorale. » De ces deux positions diamétralement opposées, force est de constater qu’une seule est légale, la seconde, et que tant qu’elle n’est remplacée par aucune nouvelle loi, la loi de 1960 est toujours en vigueur. Où peut conduire de bras de fer constitutionnel, cette politique du bord du gouffre ? Le chef de l’État parviendra-t-il à convaincre l’opinion que la sortie de l’ordre constitutionnel qu’il prévoit, en refusant de contresigner le décret de convocation du corps électoral si une nouvelle loi n’est pas adoptée, s’opère par fidélité à l’esprit de la Constitution ? Et qu’elle n’est pas une nouvelle aventure ?