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Que vient faire à Beyrouth, et pour quatre heures seulement, John Kerry ?

 

Khalil FLEYHANE

Tout le monde a été surpris par l’annonce de la visite à Beyrouth, aujourd’hui, du secrétaire d’État américain John Kerry.
Tout le monde ou presque : le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, en avait été informé avant-hier par l’ambassadeur US, David Hale. M. Bassil a d’ailleurs immédiatement informé son interlocuteur qu’il se rend à Pékin mardi soir (hier) pour participer au Forum de coopération sino-arabe. Il n’a pas omis, cela dit, de rappeler à M. Hale que John Kerry avait refusé de lui donner rendez-vous lorsqu’il était à Washington il y a quelques semaines, parce qu’il ne voulait pas que cela ait la moindre connotation politique : nous étions à l’époque en plein dans l’échéance présidentielle.

Selon des sources diplomatiques libanaises, la visite de John Kerry à Beyrouth, ultrasécurisée, sera très courte : quatre heures seulement… Il ne pourra donc se réunir avec des chefs de blocs parlementaires influents, alors même que le lie avec certains d’entre eux une amitié solide. Seule certitude : M. Kerry s’entretiendra avec le Premier ministre Tammam Salam.
Toujours selon les mêmes sources, la visite du chef de la diplomatie US est une marque de soutien au Liban, qui vit des circonstances particulières et délicates : pas d’élection présidentielle et retombées néfastes de la crise syrienne au Liban, notamment après la reconduction du mandat de Bachar el-Assad. C’est une visite importante, vu la place qu’occupe le Liban dans la stratégie politique américaine, d’autant que c’est la première qu’effectue John Kerry au Liban depuis son arrivée au département d’État, sachant qu’avant sa nomination, il s’était rendu plusieurs fois à Beyrouth, où il a tissé de nombreux liens d’amitié.
Pourquoi cette visite, pourquoi ce timing très précis, (s’)interroge un ministre estampillé 14 Mars ? Est-ce pour encourager le Liban à rester sans président de la République ? Ou est-ce, au contraire, pour insister auprès des différentes parties sur la nécessité de trouver un successeur à Michel Sleiman ? Le ministre en question se demande alors pourquoi John Kerry ne s’est pas déplacé avant le 25 mai, date de l’expiration du mandat de M. Sleiman… En attendant, il refuse de confirmer si oui ou non John Kerry est porteur de nouvelles idées, de solutions pour une sortie de crise ; si oui ou non le diplomate américain sera le sauveur.
Quoi qu’il en soit, devant les micros et les caméras, M. Kerry s’exprimera du Sérail à l’issue de son entretien avec le Premier ministre pour marteler, justement, l’urgence d’une élection présidentielle.
Pour le ministre précité, il ne faut pas interpréter cette visite comme étant une ingérence dans les affaires libanaises, ou pour soutenir un candidat contre l’autre. Loin de là : les USA sont un membre prépondérant du Groupe international de soutien au Liban et ils sont soucieux de voir préservée la stabilité politique et sécuritaire de ce pays, en plein tsunami syrien.
D’ailleurs, M. Kerry parlera beaucoup de ce sujet et de la façon d’immuniser le Liban contre les répercussions non seulement de la crise en Syrie, mais aussi de la réélection de Bachar el-Assad, ainsi que du dossier des réfugiés syriens, à l’ombre de la récente visite à Beyrouth du président de la Banque mondiale.

Enfin, John Kerry ne manquera pas de rendre hommage à l’armée libanaise, et de rappeler à ceux qui auraient été tentés de l’oublier que son pays a offert des aides militaires substantielles à la troupe, aussi bien dans les entraînements que dans la lutte antiterroriste.